Crédit : Dmitri Alechkine
« En automne, j'ai passé une semaine dans une forêt de la région de Tver (180 km au nord de Moscou), me nourrissant d'écorces d'arbre, de champignons et de baies. Je m'abritais dans une hutte construite avec des troncs de bouleaux et recouverte de branches. L'humidité suintait du toit de la cabane, mais le feu de camp m'apportait un petit peu de chaleur », raconte Vassili Telitsyne, doctorant à la Faculté d'Histoire de l’Université MGOU de Moscou. S'il a assisté à ces cours de survie dans la nature sauvage c'est que, fatigué de la mégapole russe, il souhaitait se reposer et tester sa propre résistance.
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Mais durant son voyage, point de répit : à la place, il allumait des feux dans le froid et sous la pluie torrentielle, posait des collets à lapins et écureuils et se concoctait des bouillons d'herbes pour lutter contre une crève attrapée en chemin. En parcourant 150 kilomètres en une semaine à travers une forêt inhabitée de la région de Tver, il a acquis une expérience dont seuls pourraient se targuer un agent secret des forces spéciales ou un chasseur préhistorique.
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De la jungle amazonienne à la péninsule du Kamtchatka, le club Voltchitsa dispense depuis cinq ans des cours de survie en milieu hostile à travers le monde entier. Les instructeurs ayant élaboré un système de préparation progressif, les touristes ne se retrouvent pas immédiatement dans des conditions extrêmes. L'examen final consiste en une randonnée de 200 kilomètres à travers la taïga ou les montagnes, en ayant comme unique équipement un couteau, une pierre à feu et une corde. Un instructeur accompagne toutefois le candidat, mais ne l'aide pas.
Crédit : Dmitri Alechkine
L'objectif principal des cours de survie est d'apprendre à la personne à protéger sa vie et sa santé en situation extrême. On vous y enseigne notamment à fabriquer un filtre permettant de purifier l'eau des bactéries nuisibles à l'aide de mousse, de sable ou de charbon. Il faut pour cela compacter tous ces ingrédients, et faire passer lentement, goutte par goutte, le liquide à travers. La mousse s'avère également être un moyen hémostatique irremplaçable pour soigner les plaies. De plus, le tronc et les branches des jeunes arbres sont d'un grand secours lorsque l'on doit construire une hutte. Enfin, si le temps vient à manquer, il est alors possible de déposer sur le feu une couche de branches de sapin, desquelles on se recouvre par la suite. On obtient ainsi un « sandwich », dans lequel on peut dormir confortablement, quel que soit le temps.
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Pour survivre face à un ours, il existe plusieurs techniques. Habituellement, ces animaux évitent l'homme, mais lors d'une rencontre fortuite, il convient de mettre son sac ou sa veste au-dessus de sa tête pour paraître visuellement plus grand que la bête. L'ours ne décidera pas d'attaquer une telle créature. Les voyageurs expérimentés utilisent une autre arme. Dmitri Aliochkine, directeur du club Voltchitsa, raconte en effet la fois où, dans le Kamtchatka, son groupe a croisé le chemin de l'un de ces maîtres de la forêt : « Instantanément, des insultes se sont mises à pleuvoir à l'adresse de l'ours, bien articulées et avec expressivité […], et il disparut aussitôt à la vitesse de l'éclair ».
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Le prix des cours dépend du niveau de la difficulté, une préparation de deux jours coûte 7000 roubles (112€), tandis qu'une version étendue à 5–6 jours, où l'on enseigne les fondamentaux de la survie, atteint les 22 000 roubles (351€). La formation Dernier héros est un défi bien plus sérieux : un groupe de 2–3 personnes accompagnées d'un instructeur part pour neuf jours dans la Région de Perm (Nord de l'Oural) ou en République du Touva. Les participants choisissent eux-mêmes l'itinéraire, et en chemin ils doivent se débrouiller pour trouver de l'eau, de la nourriture et fabriquer leur abri. Pour un tel voyage, il faut compter 27 000 roubles (431€). L'examen de survie final, où l'on lâche le candidat dans un lieu difficile d'accès, et d'où le chemin vers le point d'arrivée à travers la taïga prend 4 ou 5 jours revient, si l'on part de Moscou, à 154 650 roubles (2 467€).
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« La personne se retrouvant dans la forêt sauvage se sent seule et sans défense. C'est un puissant stress pour celui qui n'a pas reçu de préparation adéquate. Il était fréquent que des gens s'étant éloignés du camp de 200–300 mètres n'arrivent pas à s'orienter et se mettent à faire des signaux à leurs compagnons pour retrouver leur chemin », se rappelle Maxime Sekarov, instructeur du club. Lors de telles épreuves, les touristes ressentent de manière accrue la valeur de la communication et de l'entraide. Pour beaucoup, les cours de survie sont un moyen de tester leur force mentale.
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« Pour moi, les plus grosses difficultés furent les marécages et les moustiques. Il n'y avait aucun moyen de se protéger des insectes. Je n'avais auparavant jamais fait de randonnée, c'est pourquoi j'avais peur de me perdre et avais souvent l'impression que nous faisions fausse route », confie le parisien Jonas Pirotte, en évoquant son expérience de survie dans les forêts de Carélie.
Ce sont des amis à lui, descendants d'émigrants russes installés en France, qui l'ont entraîné dans cette randonnée. L'une d'elle, Tatiana Tikho, explique pourquoi elle a suivi ces cours de survie, accompagnée de ses camarades, Jonas Pirotte et Oleg Ossina. « Nous sommes nés en France de parents russes, et nous entretenons comme nous le pouvons le lien avec nos racines. Cette randonnée a été pour moi une grande aventure, qui m'a permis de ressentir l'âme de notre patrie d'origine. Jonas s'est joint à nous pour faire connaissance avec la Russie ».
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