Tchaïkovski, Prokofiev, Rimski-Korsakov, Moussorgski, Scriabine, Rachmaninov, Stravinsky, et la liste est encore longue. Notre tradition musicale classique est probablement le seul domaine culturel russe que l’on pourrait croire être le fruit d’une civilisation parfaitement européenne.
Les compositeurs russes se sont imposés comme de véritables citoyens du monde de par leur capacité à atteindre les gens malgré les barrières culturelles. En effet, la littérature, par exemple, ne parvient pas toujours à obtenir le même résultat, même si nous sommes tout aussi fiers de nos illustres hommes de lettres.
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Pour être honnête, nous aurions pu commencer par ce point, car s’il y a un domaine dans lequel les Russes sont en tête, c’est bien lorsqu’il s’agit de fabriquer, avec rien, des choses stupéfiantes.
La Russie est par exemple encore aujourd’hui le seul pays en mesure d’acheminer les cosmonautes vers la Station Spatiale Internationale et de les ramener, grâce aux fusées Soyouz. Après 50 ans d’exploitation, ces modèles restent toujours la référence en la matière. Les États-Unis tentent actuellement de contrer cela avec des projets développés par SpaceX et Boeing, mais leurs tests ne devraient pas avoir lieu avant 2019 selon la NASA.
Même si la conquête de l’espace jouit de pharaoniques financements, notre programme spatial nous rappelle souvent qu’il est important d’être fier de notre capacité à utiliser des outils de qualité inférieure et de maigres ressources pour élaborer des systèmes aussi, voire plus, performants que des produits résultant d’investissement de plusieurs milliards. Cette philosophie a d’ailleurs été à l’origine de plusieurs de nos armes ou voitures, mais est aussi d’une utilité indubitable dans notre quotidien, où le système D est roi.
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Si en Occident s’est répandue l’idée selon laquelle les États-Unis ont été les grands sauveurs lors de ce conflit, la Russie ne voit pas les choses ainsi. En effet, l’URSS ayant perdu pas moins de 27 millions de citoyens (contre 418 000 Américains) au cours de cette tragique page de l’histoire, le pays considère aujourd’hui que c’est bel et bien son sacrifice qui a rendu possible la victoire face à l’Allemagne nazie.
Le fait de compter plus de victimes que tous les autres a eu un profond impact sur la psychologie des Russes : cela dessine la façon dont nous voyons notre nation dans l’histoire, tant passée que présente. Bien entendu, tous ne croient pas qu’il est bon d’utiliser le sacrifice de nos grands-parents pour justifier une opinion sur les relations internationales, mais les pertes soviétiques en temps de guerre sont devenues inextricablement liées à cette habitude.
Les Russes aiment s’imaginer en combattants ou en survivalistes, tout comme ils adorent se battre d’ailleurs. Nous nous sommes en réalité frayé un chemin à travers l’histoire malgré le rude climat de nos terres et les abruptes transitions politiques et culturelles.
L’esprit robuste des Russes peut être comparé à celui des Britanniques, à la seule différence que ces derniers apprennent à enterrer leurs émotions intérieures, alors que les Russes, dans leurs abondants jurons et leurs fréquents jets d’objets à travers la pièce, font preuve d’une tout autre manière de gérer leur stress. Cela s’explique principalement par une histoire complexe, notamment lors des derniers grands conflits qu’ont été la Seconde Guerre mondiale et la guerre civile, mais aussi lors de la terrible décennie des années 1990.
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Contrairement aux peuples occidentaux, l’obstination est ici perçue comme une qualité inhérente et importante. Les Russes sont en effet persuadés que personne ne viendra les sauver en cas de besoin et qu’ils ne peuvent donc compter que sur eux-mêmes. Ainsi, être borné est en quelque sorte lié à la survie. Imaginez votre cheval mourant au beau milieu d’une interminable plaine enneigée, à des kilomètres du plus proche village. Voilà où est né ce trait de caractère.
Baudolino, d’Umberto Eco, est l’un de mes romans favoris. Parmi les créatures fantastiques qui y sont décrites, il existe un peuple aspirant sans cesse à réaliser des sacrifices, et de préférence l’ultime. Il s’agit certainement à leurs yeux du meilleur moyen de prouver leur mérite. Or, on retrouve ce trait chez les Russes aussi, à qui la notion de sacrifice est inculquée dès l’enfance. Ce trait s’est d’ailleurs particulièrement révélé au cours de la Seconde Guerre mondiale.
En réalité, les Russes se montrent toujours prêts aux plus grandes folies afin de démontrer leur bravoure et leur mérite. Cela les pousse parfois à se trouver dans des situations périlleuses, ce qui conduit malheureusement dans certains cas à des tragédies. Par exemple, l’escalade urbaine est en Russie une pratique très populaire, consistant à grimper au sommet des plus hauts édifices, sans équipement de protection.
De plus, la Russie étant une nation profondément orthodoxe, cela a probablement élevé la souffrance au rang de chemin vers la vertu, bien plus que dans les pays catholiques ou protestants. Ce phénomène se retrouve d’ailleurs dans notre littérature, où s’attarder sur les sentiments douloureux d’un personnage est monnaie courante.
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Certains pourraient se référer à cette qualité comme étant la « vaste âme russe », bien que cette expression soit plus fréquemment utilisée pour décrire les dispendieux actes de bienveillance ou de générosité de la population. En réalité, cela devrait également englober l’irrationalité des Russes, leur propension à l’exagération face à diverses situations.
Un élément crucial de la psychologie russe repose sur les normes sociales : proposer de payer pour une tournée de verres ou faire quelque chose pour le groupe sont des comportements avec lesquels nous sommes tous élevés. Mais s’offenser pour de petites insultes en fait également partie. La Russie peut apparaître tel un pays développé peuplé par des individualistes vivant dans une économie de libre marché, mais notre culture arbore encore une considérable dépendance vis-à-vis de ce que le groupe pense de nos actions individuelles, influençant profondément notre manière d’agir, pour le meilleur et pour le pire.
Dans ce second article, nous vous proposons cinq autres raisons d’être fier de vos origines russes.
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