« Si je m'endors, que je me réveille cent ans plus tard, et qu’on me demande ce qui se passe en Russie, ma réponse immédiate sera : on vole et on boit »
Mikhaïl Saltykov-Chtchedrine
Cette citation est souvent louée sur l'Internet russe et ressemble en effet à la vision du monde de Saltykov. Cependant, il n'a jamais dit ça.
Ces mots viennent d'Alexandre Rozenbaum, un ancien ambulancier russe devenu auteur-compositeur-interprète. Il l'attribua en quelque sorte à Saltykov dans une interview. Mais d’où vient en réalité cette citation ?
Lire aussi : Comprendre la mystérieuse âme russe au travers de dix citations d’étrangers célèbres
Initialement, cette phrase est tirée du Livre bleu de l'écrivain satirique russo-soviétique Mikhaïl Zochtchenko. L'auteur l’a extraite des carnets du poète Piotr Viazemski, qui l'a lui-même attribuée au grand historien russe Nikolaï Karamzine. Mais la phrase exacte ne mentionne pas le sommeil : « Si on voulait décrire avec un seul mot ce qui se passe en Russie, on devrait dire : voler ».
« Il n’y a pas d’hommes indispensables » et « Il n’y a pas de problème s’il n’y a pas d’homme ».
Joseph Staline
Même si certaines de ses citations semblent dures et tyranniques, Staline n’a pas officiellement prononcé ces mots - il était plus subtil que cela!
« Il n'y a pas de problème s'il n'y a pas d'homme » est une phrase inventée par l'écrivain Anatoly Rybakov dans son livre Enfants de l’Arbat sur le temps de la répression stalinienne - dans le livre, Staline prononce ces mots. Rybakov a avoué par la suite qu'il avait été très amusé par les journalistes et même par les historiens qui pensaient que cette phrase était authentique.
Lire aussi : Ce qu'ont dit les écrivains russes avant de mourir
« Il n'y a pas d’hommes indispensables » est une phrase attribuée à Staline dans une autre œuvre de fiction, la pièce Front (1942) de l'auteur dramatique soviétique oublié Alexandre Korneïtchouk. Mais cette phrase est réelle ! Joseph Le Bon, un homme politique français tristement célèbre pour son traitement impitoyable de la vieille aristocratie française durant la révolution, a dit cela à un vicomte qui l’implorait de lui laisser sa vie, arguant qu’il avait une éducation et une expérience qui pourraient être utiles à la République. Un an plus tard, Le Bon lui-même fut exécuté pour abus de pouvoir.
« N’épargnez pas les soldats, les femmes en feront d'autres ! »
Gueorgui Joukov
Cette fausse citation est très populaire parmi les gens qui insistent sur le fait que la tactique militaire soviétique revenait simplement à « gagner par le nombre ». Elle a également été attribuée à Pierre le Grand. Mais on ne sait pas qui l’a prononcée en premier. On pense que ces mots pourraient être liés à une lettre que l'impératrice Alexandra a envoyée à son mari, Nicolas II, dans laquelle elle décrit les lourdes pertes subies pendant la Première Guerre mondiale (17 août 1916) : « Les généraux savent qu'il y a encore beaucoup de soldats en Russie. Et c'est pourquoi ils ne lésinent pas sur les vies : c'étaient des troupes parfaitement entraînées, mais en vain ».
Lire aussi : Dix citations de grands écrivains sur le mystère de l'âme russe
Selon une autre version, le général Apraksine, qui, lors de la bataille de Gross-Jägersdorf (1757), a refusé de lancer une attaque de cavalerie, aurait déclaré : « Les chevaux sont achetés avec de l'or, quant aux soldats - les femmes en feront d'autres ». Encore une fois, c'est juste une légende sans preuve. De notre côté, nous espérons donc que personne n’a jamais rien prononcé de pareil.
« N’importe quelle cuisinière peut gouverner l’État »
Vladimir Lénine
Cette phrase, connue de pratiquement tous les Soviétiques, hommes et femmes, garçons et filles, est exactement le contraire de ce que Vladimir Lénine a dit. Dans son article Les bolcheviks conserveront-ils le pouvoir de l’État? (1917), il écrit : « Nous ne sommes pas des utopistes. Nous savons qu’un ouvrier non qualifié ou une cuisinière ne peut pas immédiatement s’acquitter de sa tâche au sein de l’administration publique (...) Mais nous exigeons une rupture immédiate avec la vision selon laquelle gouverner l’État, s’acquitter du travail quotidien banal n’est possible que pour les fonctionnaires riches ou venant de familles riches ».
Lire aussi : Léon Tolstoï contre le monde: trois «guerres saintes» auxquelles s’est livré le grand écrivain
Le poète Vladimir Maïakovski a probablement contribué à la fausse interprétation de cette citation, car il écrivit dans son poème Vladimir Ilitch Lénine : « Nous apprendrons à chaque cuisinière à gouverner l'État ».
Sur le Web russe, il existe un modèle de mème amusant qui attribue à Vladimir Lénine les mots « Vous ne devriez pas croire tout ce que les gens écrivent sur le Web », pour faire comprendre que ces jours-ci sur Internet, vous aurez de gros problèmes si vous ne vérifiez pas scrupuleusement les faits.
« Les yeux sont le miroir de l'âme »
Léon Tolstoï
Dans la tradition russe, ce slogan est attribué à l'auteur de Guerre et paix - même Yandex, le plus grand moteur de recherche russe, suggère automatiquement Tolstoï lorsque vous tapez ces mots. N'est-il pas étonnant qu'ils soient également attribués à Paulo Coelho !?
Lire aussi : Cinq choses qui mettent les larmes aux yeux des Russes
En réalité, même si Tolstoï avait écrit ceci (nous n’avons trouvé la phrase dans aucune de ses œuvres, mais si vous en savez plus, dites-le-nous, s'il vous plaît), il aurait dû savoir, en tant qu'homme très cultivé, que cela remonte à la Rome antique, quand Cicéron (106-43 av. J.-C.) a été cité comme disant : « Ut imago est animi voltus sic index oculi » (Le visage est une image de l'esprit tout comme les yeux en sont l'interprète).
Découvrez, grâce à notre article, les citations qui illustrent la présence de l'hiver dans la littérature russe.
Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.
Abonnez-vous
gratuitement à notre newsletter!
Recevez le meilleur de nos publications directement dans votre messagerie.