Bien avant la Révolution de Saur et l’implication militaire soviétique dans les affaires afghanes, les soldats de l’Armée rouge avaient déjà combattu sur le territoire de ce pays d’Asie centrale. Secrètement et vêtus comme des locaux, mais criant des « Hourra » bien russes, ils ont en effet activement participé à la guerre civile y ayant éclaté à la fin des années 1920.
La situation politique en Afghanistan avait toujours fait l’objet d’une attention particulière de la part des dirigeants d’URSS, étant donné qu’elle influençait directement la sécurité des républiques soviétiques voisines d’Asie centrale (Tadjikistan, Ouzbékistan, etc). C’est pourquoi, lorsqu’en 1929 le roi Amanullah Khan a été détrôné par les révolutionnaires et que cela a conduit à l’embrasement d’une guerre civile, Moscou s’est senti forcé d’intervenir.
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D’un côté, il y avait les masses populaires ordinaires, luttant contre l’élite, et ce type d’initiatives a, à travers le monde, toujours reçu le soutien de l’Union soviétique. De l’autre, l’Afghanistan sous Amanullah Khan jouissait de bonnes relations avec l’URSS. Les deux pays avaient élargi leur coopération économique et militaire, le souverain afghan gardait également efficacement sous surveillance les Basmatchis, rebelles antisoviétiques d’Asie centrale, qui, en fuyant l’URSS durant la guerre civile russe, s’étaient réfugiés en Afghanistan et terrorisaient les territoires soviétiques par le biais de nombreux raids. Le choix auquel faisait face Moscou, qui cherchait à tirer le maximum d’avantages de la situation, a alors été difficile.
Étonnamment, l’Union soviétique ne s’est pas pressée pour apporter son aide aux révolutionnaires paysans menés par le « fils du porteur d'eau », Habibullah Kalakani. Gueorgui Agabekov, un agent des renseignements soviétiques basé en Afghanistan dans les années 20 et ayant déserté vers l’Occident en 1930, a affirmé que les avis étaient partagés quant à savoir qui devait soutenir l’URSS dans ce conflit sur le point d’éclater. (Gueorgui Agabekov, La Guépéou : La terreur secrète russe, 1931)
La police secrète soviétique, la Guépéou, ancêtre du KGB, a appelé au soutien des révolutionnaires, qui représentaient les larges masses populaires. Cette institution supposait en effet que soutenir Kalakani aiderait à soviétiser l’ensemble de l’Afghanistan, a témoigné Agabekov.
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Une version opposée a toutefois été exprimée par le commissariat du peuple aux Affaires Étrangères (devenu en 1946 le Ministère soviétique des Affaires Étrangères). Les diplomates ont en effet affirmé que Habibullah Kalakani, un Tadjik ethnique, bénéficiait d’un solide soutien de la part de millions de Tadjiks vivant dans le Nord de l’Afghanistan, à la proximité immédiate de l’URSS. Selon le commissariat, si Kalakani venait à remporter la victoire et renforçait son pouvoir, il étendrait inévitablement son influence sur les républiques soviétiques voisines et déstabiliserait la frontière soviéto-afghane.
Ces prédictions se sont avérées vraies, Kalakani a effectivement scellé une alliance avec le leader des Basmatchis, Ibrahim Bek, et les raids basmatchis en URSS ont significativement augmenté. L’autre facteur jouant en défaveur de ce leader révolutionnaire a été qu’il était activement soutenu par les Britanniques. Par conséquent, les dirigeants soviétiquesont pris la décision d’aider le roi Amanullah Khan en envoyant leurs troupes pour restaurer la stabilité de la région.
L’Union soviétique ne souhaitait pas dévoiler ouvertement au monde son implication militaire dans la guerre civile afghane. Ainsi, les plus de 2 000 soldats de l’Armée rouge ayant pris part à la campagne d’Afghanistan se sont vêtus comme des soldats locaux. Ils étaient menés par l’ancien attaché militaire soviétique pour l’Afghanistan, Vitaly Primakov, qui s’est alors fait passer pour un Turc du Caucase, « l’officier Ragib-bey ».
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Habibullah Kalakani
Getty ImagesL’unité était accompagnée par le conseil afghan en URSS, mené par Ali Gholam Nabi Khan, qui lui a conféré un statut légal. Le conseil a prétendu être une unité de partisans d’Amanullah ayant été forcés de fuir le pays et à présent prêts à repartir et à combattre pour leur roi.
Bien équipée, armée avec des fusils et de l’artillerie, l’unité militaire a fait son entrée sur le territoire afghan le 15 avril 1929. Pouvant compter sur un support aérien, l’unité a écrasé les troupes frontalières afghanes et sont avancé plus loin au sein de la province de Balkh, jusqu’à la principale ville, Mazâr-e Charîf. Simultanément, le souverain déchu a quitté Kandahar, où il se cachait après avoir fui Kaboul, et, avec 14 000 soldats, a pris la direction de la capitale afghane, occupée par Habibullah.
Au cours de la révolte dans la ville, les soldats soviétiques ont oublié qu’ils devaient faire mine d’être Afghans, et sont passés à l’assaut en faisant résonner des « Hourra ! » typique de l’armée russe.
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Suite à la prise de Mazâr-e Charîf, les Afghans ont appelé au jihad contre les envahisseurs et ont assiégé les troupes soviétiques dans la ville. Afin d’aider les soldats de Primakov, une seconde unité de 400 hommes menés par le prétendu « Zalim Khan » (en réalité Ivan Petrov, commandant de cavalerie soviétique) a été envoyée en renforts.
La Guépéou
SputnikLes forces soviétiques réunies ont ainsi levé le siège avec succès, et ont anéanti la garde nationale d’Habibullah ainsi que les unités de Basmatchis. Ils ont alors traversé la ville de Balkh pour prendre la direction de Kaboul. Néanmoins, le 22 mai, des nouvelles ont fait état d’une désastreuse défaite des troupes d’Amanullah près de la capitale afghane et de la fuite de celui-ci du pays. Il n’y avait donc plus aucune raison pour les troupes soviétiques de rester ici, et l’unité a sans tarder été rappelée à la maison.
Durant l’opération militaire afghane, les troupes soviétiques ont éliminé plus de 8 000 soldats adverses et ont perdu 120 des leurs. Sur les documents militaires soviétiques, l’opération est mentionnée comme une lutte contre les bandits d’Asie centrale. À noter qu’il a été interdit d’écrire quoi que ce soit à propos de cette campagne dans les œuvres de la littérature historique.
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