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Getty ImagesLa Russie pourrait introduire des amendes contre les personnes morales qui transportent, stockent et vendent des produits alimentaires soumis à un embargo en 2014, en réaction aux sanctions décrétées contre Moscou après le changement du statut de la Crimée. Un projet de loi approprié a été soumis le 1er février dernier par la structure de contrôle sanitaire de Russie, Rosselkhoznadzor. Toutefois, il est d’ores et déjà évident que les amendes qui sont proposées seront incapables de modifier la situation, les fournisseurs ayant appris depuis longtemps à contourner l’embargo.
« La Russie connaît un grand nombre de schémas permettant d’importer +en douce+ des produits, ce qui voue pratiquement à l’échec l’initiative de Rosselkhoznadzor, indique Denis Frolov, partenaire de la société juridique BMS Law Firm. Il est peu probable que la situation change même en cas de responsabilité pénale pour violation du régime des sanctions », renchérit Maxiem Tafintsev, partenaire de Maalouf Ashford & Talbot.
« Mon mari étant Italien et habitant Reggio d’Émilie où se situe une fromagerie qui fabrique du parmesan, il achète du fromage et me l’envoie par la poste », poursuit-elle. Pour organiser son petit business, Marina a créé un site russophone avec un nom de domaine international et diffuse les informations via des amis. Son mari a obtenu les documents d’autoentrepreneur en Italie et paie officiellement un impôt de 40% sur le revenu. Le prix du parmesan peut ainsi doubler, voire tripler, car il tient compte non seulement de la marge commerciale et de la livraison par la poste, mais également du montant de l’impôt.
À Saint-Pétersbourg, qui n’est qu’à 200 kilomètres de la frontière de la Finlande, le schéma est un peu différent. Le réseau social russe VKontakte présente plusieurs groupes portant des appellations comme Fromages d’Europe ou Jambon d’Espagne qui ramènent les produits interdits de voyages en bus en Finlande.
« On forme un groupe de touristes qui achètent les produits et qui ramènent le poids autorisé maximal de bagages, soit 50 kilos par personne », note Anton Beliaïev (le nom a été modifié), 28 ans, propriétaire d’un groupe de vente de fromages dans Vkontakte. Le principe : rembourser à ces touristes tout ou partie du prix du voyage. Anton n’est pas enregistré comme entrepreneur et ne paie aucun impôt. Outre les réseaux sociaux, les produits interdits sont vendus sur le site d’annonces Avito.
La péninsule de Crimée a intégré la Russie, mais l’intégration au système douanier russe n’est toujours pas achevée, rappelle Maxime Tafintsev. Et les douanes de Crimée ne possèdent pas les ressources requises pour contrôler toutes les marchandises. « Pour l’instant, l’importation de marchandises depuis l’Ukraine n’est pas interdite et différents produits, notamment soumis à l’embargo, peuvent se retrouver en Crimée et poursuivre leur chemin à travers toute la Russie », poursuit-il.
Selon Denis Frolov, il est difficile de suivre la circulation des marchandises en transit en Russie, ce qui fait que ce schéma est appliqué lui aussi. « L’article voyage d’Europe par exemple à destination de l’Ouzbékistan, mais +se perd+ en Russie », explique-t-il.
Les produits en provenance de certains pays européens, par exemple la Suisse ou Saint-Marin, ne se sont pas soumis à l’embargo et peuvent être livrés librement en Russie. « Ainsi, les produits des pays frappés par l’embargo arrivent en Suisse où les étiquettes officielles sont remplacées afin qu’ils puissent poursuivre leur voyage jusqu’à notre pays », dit Maxime Tafintsev. Ce schéma de réexportation est également appliqué en Biélorussie, fait-il encore remarquer.
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