La toponymie russe porte l’empreinte de l’histoire de ce pays mouvementé. Certaines villes, suite aux divers changements de régime politique, ont été renommées deux voire trois fois. Volgograd est l’une d’entre elles.
À partir des années 1990, la question du retour du nom de Stalingrad est régulièrement posée. Comme expliqué récemment par le président Vladimir Poutine, « conformément à notre loi, ce choix doit être pris par la région et la municipalité. Dans ce cas précis, c’est aux habitants de se prononcer par référendum ».
L’ancienne capitale de Russie, en revanche, a retrouvé son nom d’origine. Avant la Première Guerre mondiale, la ville des Tsars portait le nom de Saint-Pétersbourg, en hommage non pas à son fondateur au début du XVIIIe siècle, Pierre Ier, comme beaucoup le pensent, mais en hommage à Saint Pierre.
Au début de la Première Guerre mondiale, son nom est « russisé », en retirant le « Saint » qui la précède et en rajoutant le suffixe « grad » (ville), pour Pétrograg.
Mais une dizaine d’années plus tard, après la mort du leader de la révolution de 1917 Lénine, la ville est rebaptisée Leningrad. Nom qu’elle portera jusqu’au début des années 90, où la ville reprendra celui de Saint-Pétersbourg.
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Donner aux villes le nom des leaders communistes disparus est une tradition qui a perduré durant presque tout le XXe siècle : jusqu’à l’effondrement de l’Union soviétique, la Russie avait, sur sa carte, des villes répondant aux noms d’Ordjonikidze, Kouïbyshev, Brejnev et Andropov.
Encore aujourd’hui, il existe les villes de Kirov, Kaliningrad (anciennement Königsberg) et Togliatti (en hommage au chef du Parti communiste italien), ville qui a accueillit sous l’ère soviétique le siège du constructeur automobile Lada, qui a créé le prototype de l’un des modèles de l’italien Fiat.
Avec l’effondrement de l’Union soviétique, la nouvelle Russie assiste à quelques couacs concernant la renomination des capitales des ex-républiques soviétiques. Si la reconversion de la capitale du Kazakhstan Alma-Aty en Almaty s’est faite sans grande douleur, un débat plus houleux, d’ordre orthographique, vient perturber la capitale estonienne.
Alors que sous l’Union soviétique, la ville de Tallin ne portait qu’un « n », l’Estonie indépendante décide que la ville de Tallinn prendra désormais deux « n ». Et elle insiste même pour que ce double « n » soit respecté dans l’écriture russe.
Plusieurs année, cette condition a été respectée, puis, la Russie est revenue à son orthographe traditionnelle. La question de la présence ou non de la double lettre alphabétique est devenue une affaire de principe. Et pas tant sur le plan linguistique que sur le plan politique.
Une situation semblable s’est produite à la suite du conflit russo-géorgien de 2008, au moment où a été prononcée l’indépendance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud.
Les deux états ont immédiatement déclaré leur intention de changer le nom de leurs capitales : Soukhoumi, la capitale abkhaze, devient Soukhoum, et Tsinkhvali, la capitale de l’Ossétie du Sud, devient Tsinkhval (dans ce contexte, le « i » apporte une consonance géorgienne. La Géorgie continue de nommer ces deux villes en terminant par la lettre « i », ce qui relève encore une fois du champs politique.
Une autre variante de la confrontation politico-linguistique peut être observée en ce moment même. Il ne s’agit certes pas du nom d’une ville, mais d’un pays tout entier. Lorsque les Russes relatent un évènement dans un pays étranger, ils l’accompagne toujours de la préposition « v » (« en ») : « en Amérique, en Allemagne, en Chine ».
Mais pour l’Ukraine, la langue a conservé la forme « na » (« à »), préposition qui ne s’utilise que pour les régions de Russie (« à l’Oural, à Kouban, à l’Extrême-Orient »).
Et à ce jour, dans la société russe, il n’y a toujours pas de consensus sur le bien-fondé de l’une ou de l’autre variante : la majorité (y compris les linguistes), continuent de penser que la seule forme exacte reste la plus traditionnelle « na Ukraïne » (« à l’Ukraine »), tandis que les Ukrainiens considèrent qu’elle ne correspond pas aux nouvelles réalités politiques du pays.
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