Dans le cadre des campus internationaux organisés par la Société russe de préservation du patrimoine (VOOPIK) et son homologue français REMPART, des bénévoles venus de France ont survolé le continent afin de participer, du 17 au 28 juillet, à la restauration du monastère Donskoï et de la maison Palibine, à Moscou. Cette visite succède en réalité à celle de volontaires russes ayant en avril dernier participé à un chantier de restauration dans l'Hexagone, a expliqué à la presse Pavel Chichmarev, directeur de VOOPIK, qui a lui-même pris part au chantier du château de Berzy-le-Sec, dans l'Aisne.
Tout comme REMPART, VOOPIK a vu le jour en 1966 et a depuis lors permis la restauration de plus de 3 000 monuments architecturaux en Russie. C'est aussi cette association qui a été à l'initiative du label de l'Anneau d'or, légendaire circuit touristique traversant les anciennes villes princières située autour de Moscou. En octobre 2016, les deux organisations ont cosigné une convention de partenariat avec pour ambition d'accroître les échanges entre la Russie et la France dans le domaine du volontariat pour le patrimoine.
Chantier du monastère Donskoï. Crédit : Service de presse
Au monastère Donskoï, les bénévoles français s’affairent donc actuellement à reprendre les maçonneries de brique sur deux tours de l'enceinte, à restituer les enduits de leurs murs et à déblayer le terrain. Du côté de la maison Palibine sont effectuées des opérations de retrait des anciennes peintures, de nettoyage des éléments sculptés, de masticage des fissures, de renforcement des surfaces, de traitement du bois et de remplacement des fragments perdus, a indiqué le service de presse de l'association REMPART.
Ces ouvriers à la motivation inébranlable ont fait part à RBTH de leur ressenti et de leur expérience à Moscou. Voici leurs témoignages.
Noé Bodart: «Beaucoup d'architectes en ont marre de rester devant leur ordinateur»
Crédit : Service de presse
« On réalise un piquetage, c'est-à-dire qu'on enlève l'enduit d'une tour du monastère dans l'optique d'en remettre un pour protéger le mur. En Russie, il y a un climat très rude, donc la restauration des monuments est plus difficile. À mon avis, il y a dû avoir deux couches d'enduit depuis la construction », éclaire de son œil d'expert cet architecte parisien de 31 ans, présent sur le chantier du monastère Donskoï, l'un des plus anciens complexes religieux du pays.
« C'est mon premier séjour en Russie et je suis très impressionné, Moscou est complètement en chantier en ce moment et c'est très surprenant de voir cet engagement vis-à-vis de la restauration de la ville. On voit que les Russes ont la volonté de bien faire et de montrer qu'ils font bien les choses. Moi, ça me permet d'avoir un travail manuel, car c'est vrai qu'aujourd'hui le travail architectural est très informatisé et beaucoup d'architectes en ont marre de rester devant leur ordinateur. Donc c'est un bon moyen de prendre du plaisir tout en approfondissant mes connaissance du terrain », s'enthousiasme-t-il.
François Nicolas: «On apprend relativement vite»
François Nicolas et Christophe Pages. Crédit : Service de presse
« En fait j'ai toujours voulu aller en Russie, c'est depuis longtemps comme une passion, mais je n'en avais jamais eu l'occasion. Quand j'étais adolescent, je lisais beaucoup de romans et de théâtre russes, donc j'ai un peu cette fascination pour la Russie. Je sais bien que la Russie d'aujourd'hui n'est pas la même mais je pense qu'il y a un fond culturel dans la manière dont les gens vivent ici qui est résonnant », nous livre François Nicolas, 46 ans, ingénieur dans le secteur médical à Paris.
« Ce que je trouve extrêmement intéressant, c'est que le monastère Donskoï est en plein Moscou, c'est un énorme complexe très connu, et nous, on a la responsabilité d'aider à la restauration d'une des tours du mur d'enceinte. On a une certaine fierté à participer à ce chantier. Il est vrai qu'on apprend un peu sur le tas je dois dire, avant je n'avais jamais tapé sur un mur avec un marteau, mais on apprend relativement vite. C'est drôle, mais aujourd'hui j'ai aidé les ouvriers à finir de monter l'échafaudage, et étant plutôt cadre, ce n'est pas tous les jours que je peux travailler comme ça en proximité avec des ouvriers sur une tâche commune », se félicite François.
Pauline Rivière (2ème à droite). Crédit : Service de presse
« Ce qui m'a poussée à venir ici, c'est l'envie de travailler avec des Russes et de vivre une expérience autre que du tourisme pour vraiment être immergée dans la vie locale. C'est ma première expérience de chantier mais je suis déjà venue en Russie en vacances il y a un an. J'avais bien apprécié mais c'était du simple tourisme. Du coup, en voyant l'annonce de REMPART, je me suis dit que ça pouvait être intéressant de pouvoir voir la Russie autrement, car quand on vient en tant que touriste, on voit les Russes dans les hôtels, dans les boutiques de souvenirs, là on vit vraiment avec eux », confie Pauline Rivière, 31 ans, bibliothécaire dans une université de Paris.
« On est logés au monastère, en fait il y a une maison d'hôte à l'intérieur, donc on prend nos repas ici, au réfectoire. Les bénévoles de VOOPIK parlent français, donc la communication est plus aisée qu'avec les ouvriers du monastère, mais avec eux ça se passe finalement très bien aussi car on communique avec les mains. Après, au niveau de la vie quotidienne avec les Russes, on a de la chance parce qu'on travaille en gros de 9h à 18h tous les jours, et le soir ils organisent des sorties pour découvrir la ville. Hier, on a été au Kremlin, à la place Rouge et dans les petites rues autour pour boire un café. Ce soir, on va faire une croisière sur la Moskova, c'est vraiment intéressant car on va dans des endroits où on ne serait pas forcément allé de nous-même », se réjouit-elle.
Christophe Pages: «J'aimerais revenir en Russie, si possible en hiver»
Christophe Pages. Crédit : Service de presse
« Il n'est pas forcément nécessaire d'avoir des connaissances en restauration. Par exemple, en histoire de l'art, on étudie surtout la sculpture et la peinture et pas forcément l'architecture, et surtout pas l'architecture autre que celle d'Europe de l'Ouest. Travailler le bois est très différent, il faut beaucoup plus de délicatesse et de minutie qu'avec la pierre. Là on enlève la vieille peinture avec le ciseau à bois, etc, et après je suppose qu'on va repeindre par-dessus », précise Christophe Pages, étudiant toulousain en histoire de l'art, après avoir été transféré du monastère à la maison Palibine.
S'imposant à Moscou comme l'un des rares héritages de l'architecture individuelle en bois du début du XIXe siècle, cette bâtisse nécessitait quelques travaux de rénovation au niveau de sa façade.
« J'ai visité le musée russe à Saint-Pétersbourg, j'ai beaucoup aimé les peintures d'Aïvazovski. J'ai vu un peu aussi tout ce qui est art mobilier avec les œufs de Fabergé, qui sont des œuvres d'art magnifiques et incroyables. J'aimerais revenir en Russie, si possible en hiver, et peut-être visiter d'autres villes comme Irkoutsk ou Rostov-sur-le-Don. J'ai lu le livre Ermite dans la Taïga qui m'a beaucoup inspiré », conclut-il, visiblement satisfait du début de son séjour.
Crédit : Service de presse
Par ailleurs, deux autres chantiers pourraient être prochainement organisés en Russie par VOOPIK et REMPART. Des bénévoles pourraient en effet être invités à prendre part à la restauration du monastère Saint-Joseph de Volokolamsk au nord de Moscou, et de Iasnaïa Poliana, domaine de l'écrivain Léon Tolstoï situé non loin de la ville de Toula (193 km au sud de Moscou). Une occasion de plus pour les amateurs d'art et d'histoire de retrousser leurs manches.
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